Les îles Falklands (Islas Malvinas)
Le 2 avril 1982 sans déclaration de guerre, l’Argentine envahit les îles qu’elle appelle les Malouines et qui sont alors contrôlées par le Royaume-Uni qui les appelle les Falklands. Londres prépare alors sa contre-attaque. Les deux pays revendiquent la souveraineté sur cet archipel isolé et au climat hostile et sont prêts à entrer en guerre pour son contrôle.
Dans cette vidéo, retraçons sur cartes les origines et l’évolution de ce conflit qui dure depuis plus de 3 siècles.
Historiquement, l’archipel est isolé et inhabité. Le climat y est rude, avec des températures fraîches, un haut taux d’humidité et de puissants vents. Aucune forêt n’y pousse, les côtes sont un abri pour des oiseaux et des mammifères marins tels que les manchots et les otaries. Récemment, des traces anciennes de ce qui semble être une chasse contre ces derniers ont été découvertes sur l’île de New Island. Ce qui suggère que des hommes, probablement des Yagans qui étaient issus sur la Terre de Feu et qui maîtrisaient la navigation, s’y rendaient épisodiquement pour chasser.
Explorateurs européens
Au cours du 16ème siècle, de nombreux explorateurs européens sont passés dans les environs et pourraient avoir vu l’archipel. Mais il y a encore débat aujourd’hui pour savoir qui a été le tout premier à le découvrir. Il se pourrait que ce soit Amerigo Vespucci ou l’un des navires de l’expédition de Fernand de Magellan. De nombreux autres explorateurs, principalement espagnols et anglais ont probablement vu cet archipel situé à environ 500 km du continent. Mais dans un premier temps, les puissances européennes y portent peu d’intérêt. En 1690, le navigateur britannique John Strong explore l’archipel. Il entre dans le détroit qui sépare les deux îles principales et qu’il baptise “le détroit de Falkland”, en hommage à l’un des propriétaires du navire qui est vicomte de Falkland en Ecosse. L’équipage est le premier à débarquer sur l’archipel et découvre avec étonnement un mammifère endémique qui ressemble à un mélange entre un loup et un renard. L’animal est appelé “the Falkland Islands Wolf” qui sera plus tard traduit en français par “Le loup des îles Malouines”. Il se peut qu’il ait été importé là par les Yagan. Par la suite, la Grande Bretagne montre de plus en plus d’intérêt pour ce territoire, mais l'Espagne s’oppose farouchement à toute implantation étrangère, car elle craint que l’archipel devienne une base pour des expéditions qui menaceraient ses richesses des côtes Pacifique d’Amérique, et plus particulièrement l’or et l’argent du Pérou.
Premières colonies
En 1763, à la fin de la Guerre de Sept Ans, la France perd une grande partie de ses colonies américaines au profit de la Grande Bretagne qui domine désormais les mers avec sa puissante Royal Navy. Le français Louis-Antoine de Bougainville rêve alors d’établir de nouvelles colonies. Il organise une expédition qui part fonder Port Saint Louis, la première colonie permanente de l’archipel qu’il appelle les “îles Malouines” en hommage aux habitants du port de Saint-Malo en Bretagne. Les premiers colons sont principalement des marins pêcheurs Acadiens. Sur les côtes, ils chassent les phoques et les otaries et sur terre, ils importent des bovins qu’ils laissent en liberté. A peine deux ans après l’arrivée des français, les Britanniques arrivent à leur tour dans ce qu’ils appellent désormais l’archipel des Falklands, sans savoir que les français s’y trouvent déjà. Au Nord Ouest, ils implantent leur colonie qu’ils nomment Port Egmont. Au même moment, les espagnols qui apprennent l’existence de Port Saint Louis, contestent fermement les ambitions de leur allié français, et après des négociations, récupèrent la colonie en échange d’une compensation financière. Port Saint-Louis devient Puerto Soledad et le nom français de l’archipel est conservé et traduit pour devenir las Islas Malvinas.
La crise des Malouines
Dans les années qui suivent, les Espagnols découvrent la présence des Britanniques et exigent leur départ, mais sans succès. En 1770, le gouverneur de Buenos Aires envoie alors une importante flotte militaire qui chasse les Britanniques. Furieuse, Londres se prépare à une guerre. L’Espagne cherche le soutien de son allié français, mais ce dernier lui indique ne pas être prêt à entrer en guerre. Le pouvoir espagnol entame alors des négociations avec la Grande Bretagne, puis désapprouve officiellement l’action du gouverneur de Buenos Aires. La colonie Britannique est rétablie, les deux pays cohabitent sur l’archipel et revendiquent chacun l'entièreté du territoire.
Abandons
En Grande-Bretagne, la situation économique est difficile et la tension monte avec les colonies nord-américaines qui se rebellent. Mise à mal, Londres rappelle ses troupes isolées à travers le monde, y compris celle des Falklands. Au moment de quitter Port Egmont, les soldats laissent derrière eux une plaque indiquant que l’archipel reste une possession britannique. Mais alors que la Guerre d’indépendance des États-Unis fait rage, l’Espagne en profite pour détruire Port Egmont. Il ne reste donc plus qu’une centaine d’espagnols dans les Malouines, principalement des soldats et des condamnés. Mais la vie rude sur l’archipel et la population décline lentement. Au début du 19e siècle, la France de Napoléon occupe l’Espagne. Des mouvements indépendantistes émergent alors en Amérique latine, et les troupes présentes dans les Malouines sont appelées en renfort à Montevideo. En 1811 elles quittent Puerto Soledad, laissant elles-aussi derrière elles une plaque indiquant que l’archipel est une possession espagnole. Par la suite, seuls quelques pêcheurs et chasseurs de phoques continuent de s’y rendre de temps en temps.
Provinces Unies du Río de la Plata
En 1816, les Provinces Unies du Río de la Plata déclarent leur indépendance et revendiquent la souveraineté sur les îles Malouines. Le nouveau pays encourage Luis Vernet, un commerçant de Hambourg, d’y établir une colonie en échange de quoi il peut exploiter les ressources de l’île sans payer d’impôt. Il part alors fonder Puerto Luis sur l’ancien Puerto Soledad. Mais les navires étrangers ne reconnaissent pas son pouvoir et continuent de chasser le phoque. Il fait alors arrêter des navires états-uniens. En réaction, les États-Unis envoient un navire militaire qui ravage Puerto Luis. Les Britanniques en profitent et envoient une flotte prendre le contrôle du territoire. Une nouvelle capitale appelée Stanley est fondée plus au sud. La chasse aux bovins qui avaient été importés par les Français et qui sont devenus sauvages, forme la principale économie de l’île.
Colonie britannique
En Amérique du Nord, après une victoire contre le Mexique, les États-Unis obtiennent la Californie où de l’or est découvert ce qui provoque une ruée vers l’Ouest. La voie terrestre étant dangereuse, beaucoup préfèrent la route maritime qui contourne le continent. Stanley devient alors une étape importante pour se ravitailler et pour faire des réparations aux navires avant le dangereux passage du Cap Horn. La colonie se développe rapidement. Les Britanniques importent aussi des moutons pour organiser leur élevage, mais du coup éradiquent le Loup des îles Malouines qui est un prédateur. L’archipel devient aussi un relais important pour les baleiniers qui chassent dans les mers alentour. En 1914, le canal de Panama est inauguré, ce qui raccourcit le voyage entre les deux côtes des États-Unis. Stanley perd alors de son importance. Lors de la Première Guerre mondiale, l'amiral allemand Maximilian von Spee qui est basé en Asie, tente une attaque surprise contre Port Stanley, mais il tombe nez à nez avec une importante flotte Britannique. A lieu alors une importante bataille navale qui tourne à l’avantage des Britanniques. Après la guerre, une série de mesures sont prises pour protéger les espèces en voie de disparition comme les phoques ou les baleines. Après la Seconde Guerre mondiale, le Royaume-Uni est en difficulté financière et doit gérer des mouvements indépendantistes un peu partout dans le monde. Le pays porte alors moins d’intérêts pour les îles Falklands qui abritent environ 3000 habitants.
Revendications argentines
L’Argentine de son côté continue de revendiquer sa souveraineté sur l’archipel et en 1953, le président Juan Peron propose au Royaume-Uni de racheter les îles, mais c’est refusé. En 1964, l’Argentin Miguel Fitzgerald part avec un petit avion et atterrit sur l’hippodrome de Stanley. Il hisse un drapeau argentin et donne à des locaux une lettre demandant la fin de l’occupation britannique sur l’archipel. Deux ans plus tard, un groupe d’argentins détourne un avion civil qui se rendait à la Terre de Feu et le font atterrir à Stanley. Ils prennent ensuite des locaux en otages, mais ils sont finalement capturés et renvoyés à Buenos Aires pour y être jugés. En 1968, Miguel Fitzgerald réitère son expédition, cette fois accompagné de journalistes. Mais à Stanley, des obstacles ont été installés sur la piste de l'hippodrome. L’avion tente d’atterrir sur une route mais se crash et l’équipage est fait prisonnier. Mais toutes ces actions ne sont pas sans conséquences. D’une part, Londres renforce la sécurité autour de l’archipel en faisant patrouiller un navire militaire, et d’une autre, la population locale perçoit désormais l’Argentine comme une menace, et préfère rester liée au Royaume-Uni plutôt que de prendre son indépendance et de risquer de se faire envahir par l’Argentine.
Montée de l’influence de l’Argentine
En 1970, la compagnie qui organise l’unique liaison maritime entre Stanley et Montevideo annonce la fin proche de son activité. L’archipel qui n’a aucune autre connexion avec le monde extérieur risque de se retrouver totalement isolé. Mais au Royaume-Uni, la situation économique est difficile et le pays ne veut pas prendre en charge l’ouverture de nouvelles routes. Le pays se rapproche alors secrètement de l’Argentine et lui offre de gérer à ses frais les voies de communication vers les îles. L’accord est officiellement signé en 1971 et l’Argentine ouvre une ligne aérienne qui relie Stanley à Comodoro Rivadavia. Les habitants de l’archipel passent donc de 4 à 5 jours de navigation pour rejoindre Montevideo à environ 5 heures de vol jusqu’à Buenos Aires. De plus, l’Argentine prend en charge la poste, fournit des produits frais, ouvre l’accès à ses universités et hôpitaux et envoie même des professeurs d'espagnol sur place pour enseigner la langue. Mais en 1976, un coup d’État militaire à lieu en Argentine. La junte qui monte au pouvoir exige un retour sur investissement dans les Malouines. Mais au Royaume-Uni, la situation économique est trop compliquée pour prendre le relai si l’Argentine coupe les voies de communication. Les locaux se sentent alors pris au piège.
La guerre des Malouines
En 1981, la première ministre Margaret Thatcher cherche à faire des économies et diminue les dépenses militaires. Le navire qui est chargé de patrouiller dans les Falklands, interrompt sa mission. Pour l’Argentine, c’est le signe que l’archipel est à portée de main. Le 2 avril 1982, sans déclaration de guerre, les forces spéciales argentines débarquent sur l’archipel et s’emparent rapidement de Stanley. A Londres, Margaret Thatcher choisit de ne pas lâcher le territoire et envoie son armée pour reprendre le contrôle. Pendant ce temps sur l’archipel, les Argentins mettent en place leur administration. L’espagnol est imposé, de nouveaux timbres sont imprimés et le nouveau pouvoir tente même de faire rouler à droite. Finalement, l’armée britannique débarque et reprend le contrôle de l’archipel.
Développement économique
Le Royaume-Uni change alors sa stratégie et investit désormais massivement pour développer et protéger les îles Falklands. Une nouvelle base militaire est construite, et une ligne aérienne civile est ouverte, reliant directement le Royaume-Uni. Par ailleurs, le pays se rapproche désormais du Chili pour compenser les fermetures des lignes avec l’Argentine. Enfin, l’économie locale est développée, des routes sont construites et l’archipel découvre que ses mers sont riches en calamars, ce qui relance l’économie. En 1998, le président argentin Carlos Menem, lors d’une visite à Londres, réaffirme que son pays continue de revendiquer les Malouines. En mars 2013, un référendum est organisé dans l’archipel. Sans surprise, 99,8% des participants veulent conserver le statut de territoire Britannique d’outre mer. L’Argentine répond que cela ne change rien à sa revendication. Aujourd’hui, l’archipel est peuplé par environ 3700 habitants et 1700 soldats. La pêche des calamars, le tourisme et l’élevage de moutons forment les principaux revenus, alors que de plus en plus de fouilles sont faites dans les fonds marins, à la recherche de pétrole.