Les origines de la Russie (1/3)
Les Varègues (850 > 940)
Au cours du IXe siècle, la Scandinavie au nord de l’Europe est peuplée entre autres par les Vikings, d’excellents marins qui explorent dans toutes les directions pour piller, mais aussi pour développer des routes commerciales. Tout au sud se trouve le puissant Empire Byzantin avec sa capitale Constantinople qui est un carrefour commercial important entre l’Orient et l’Occident. La ville intéresse particulièrement des vikings aussi appelés les varègues. Ceux-ci remontent alors les fleuves et rivières avec leurs embarcations légères qu’ils peuvent ensuite porter pour rejoindre les sources du Dniepr et atteindre la mer Noire. A Constantinople, ils vendent essentiellement des fourrures, du miel et des esclaves capturés en chemin. La route commerciale se développe rapidement, attirant de nombreux colons varègues qui partent fonder des comptoirs fortifiés. L’un d’eux appelé Riourik, aurait fondé la principauté de Novgorod, devenant le premier de la très longue dynastie des Riourikides. En 882, son héritier Oleg le Sage descend avec une armée et conquiert Smolensk puis Kiev. Il fonde alors la Rus’ de Kiev aussi appelé la Russie kiévienne, dont il devient le prince. Le nouvel État englobe principalement des tribus slaves et finnoises.
Rus’ de Kiev (940 > 1015)
Au Sud-Est, la tension monte avec le riche Royaume Khazar qui contrôle l’importante route commerciale de la Volga. En 964, Sviatoslav le Brave lance une expédition militaire contre ce dernier. Après avoir soumis les Bulgares de la Volga, il détruit Itil la capitale Khazar puis confirme sa domination en soumettant l’empire Bulgare dans les Balkans. Mais le royaume Khazar, affaibli, ne fait plus barrage aux tribus nomades d’Asie centrale qui viennent s’installer au Sud de la Rus’ de Kiev. Parmi celles-ci se trouvent les Petchénègues qui en 972 tuent Sviatoslav lors d’une embuscade. La Russie kiévienne est divisée entre les 3 fils héritiers et une guerre fratricide éclate. Vladimir, le prince de Novgorod, fuit en Scandinavie où il forme une armée de mercenaires. Il revient, s’empare de Kiev, tue son frère et prend le titre de Grand-Prince de Kiev. Au sud, l'Empire Byzantin, déjà en guerre contre les Bulgares, subit une insurrection. L’Empereur demande de l’aide à Vladimir qui lui envoie 6000 guerriers. En échange, Vladimir demande la main de la sœur de l’empereur. Mais pour se marier, il doit rompre avec le paganisme et se convertir au christianisme. Après son baptême et son mariage, le christianisme de rite Byzantin devient la religion officielle de la Rus’ de Kiev, sous l’autorité du Patriarche de Constantinople.
Les principautés russes (1015 > 1193)
Après la mort de Vladimir, une nouvelle guerre fratricide éclate et tourne à l’avantage de Iaroslav le Sage. Sous son règne, le territoire de la Rus’ de Kiev continue de s’étendre et la menace Petchenègue est éliminée. En 1054, après des tensions entre Rome et Constantinople, le christianisme est scindé entre l’Église orthodoxe et l’Église catholique. Ce qui creuse encore le fossé entre les slaves de la Rus’ de Kiev et les slaves polonais convertis au catholicisme. Iaroslav qui a de nombreux fils craint une nouvelle guerre fratricide après sa mort. Il décide alors de diviser la Russie kiévienne en plusieurs principautés qu’il partage entre ses fils en qui il a le plus confiance. L’aîné obtient le titre le plus important de Grand-Prince de Kiev. Après sa mort, le cadet prendra sa place et les princes changeront de trône. Ce nouveau partage du pouvoir avec une rotation va provoquer pendant plusieurs générations de très nombreuses guerres intestines qui épuiseront et diviseront la Rus’ de Kiev. A l’inverse, la religion orthodoxe gagne en importance et renforce l'identité russe. Dans les grandes villes, des assemblées populaires appelées les Véchés, et les aristocrates appelés les Boyards forment des contre-pouvoirs. A Novgorod, ceux-ci gagnent en influence et après avoir rejeté leur prince, obtiennent l’indépendance de la République de Novgorod. Celle-ci vit essentiellement du commerce des fourrures et étendra son influence vers le nord, englobant les tribus finnoises. En 1157, Andreï Bogolioubski devient le prince de Vladimir-Souzdal. Il veut renforcer et étendre son pouvoir, ce qui provoque des tensions avec Kiev qu’il saccage en 1169. La ville de Vladimir monte en puissance, ce qui marque une rupture entre le nord et le sud.
Menaces catholique et mongole (1193 > 1237)
En Europe occidentale, la religion catholique est de plus en plus offensive. Le Pape lance les croisades baltes, destinées à convertir les peuples païens autour de la mer baltique. Des chevaliers germains fondent Riga et entament leur conquête. Au même moment, une quatrième croisade initialement envoyée vers la Terre Sainte, est détournée vers Constantinople. La ville est assiégée puis pillée. L’empire Byzantin se retrouve divisé, la Russie kiévienne perd un allié important. A l’Est, le Khan de Couman subit une attaque de chevaliers inconnus provenant d’extrême orient et appelés les mongols. Les princes russes forment une coalition pour repousser cette nouvelle menace, mais ils sont défaits. Les Mongols partent ensuite vers le Nord où ils subissent une défaite face aux Bulgares de la Volga, avant de disparaître. Les princes russes l’ignorent, mais il ne s’agissait que d’une avant-garde en repérage. Ils sont pour le moment plus inquiets par la menace catholique à l’Ouest, alors que l'État teutonique est créé. A plus de 5000 km de là, à Karakorum la capitale de l’empire mongole, le Khan Ögedeï, un descendant de Gengis Khan, entame de nouvelles conquêtes. Une armée principalement composée de Tatars, c’est-à-dire d’une autre tribu soumise aux mongoles, se dirige vers les steppes russes.
Invasion mongole (1237 > 1299)
L’armée mongole domine tous ses adversaires grâce à sa puissante cavalerie montée par des archers. En chemin, ils sèment la terreur en rasant les villes qui refusent de se soumettre. Les principautés russes, déjà divisées et affaiblies, ne résistent pas. L’Europe tremble alors que les Mongols entrent en Pologne et en Hongrie. C’est finalement la mort du Khan Ögedeï qui met un terme à l’offensive. L’empire Mongole s’étend alors sur presque toute l’Asie. Les principautés russes se retrouvent soumises à la Horde d’or dont la capitale est Saraï. N’ayant pas les moyens d’installer des garnisons dans toutes les villes, les Tatars imposent aux princes russes d’aller à Saraï pour demander le Yarlik, c’est-à-dire une autorisation à régner. Les Tatars contrôlent ainsi à distance les territoires soumis sans interférer dans la politique intérieure. Seul un tribut est imposé aux principautés. De leur côté, les princes russes qui obtiennent le Yarlik, sont assurés d’être protégés par l’armée Tatar, alors que les rivalités persistent. Par ailleurs, les Mongols sont tolérants vis-à-vis de toutes les religions. L’église orthodoxe est donc protégée et est même exemptée de taxe. Alors qu’à l’inverse, les catholiques européens occupent militairement les villes soumises et convertissent de force. Le Métropolite de Kiev, c'est-à-dire le plus haut représentant orthodoxe dans le pays, emménage alors à Vladimir.
La Lituanie et la Moscovie (1299 > 1533)
Au cœur des principautés russes, se trouve la jeune Moscovie. Assez bien isolée des menaces extérieures elle attire et se développe rapidement. Au point qu’en 1325, Moscou devient la nouvelle capitale du Grand Prince et du Métropolite. A l’Ouest, les païens lituaniens qui résistent encore à l’État teutonique, conquièrent désormais les territoires de l’ancienne Rus’ de Kiev. La Lituanie rêve d’unir les terres russes en un seul état. En 1380, le Grand Prince de Moscou monte une coalition et bat l’armée Tatar, mais ces derniers reprennent rapidement le contrôle en saccageant Moscou. En 1386, le Grand-duc lituanien, pour obtenir la main de la reine polonaise, se convertit au catholicisme, bien que la majorité de son peuple soit orthodoxe. Ce qui rapproche les deux pays. Dans les années qui suivent, la Moscovie qui rêve elle aussi d’unir toutes les terres russes, englobe ses voisins un à un, alors que le pouvoir de son Grand Prince est renforcé. A l’inverse, la Horde d’or commence à décliner et à se diviser. En 1453, Constantinople tombe aux mains des ottomans. Le nouveau Grand Prince Ivan III, se déclare alors l’héritier de Byzance et fait de Moscou la nouvelle gardienne de l’orthodoxie. La ville sera plus tard surnommée la troisième Rome. Après avoir annexé Novgorod, l’armée d’Ivan III part à la rencontre de l’armée Tatar. Les deux se font face de part et d’autre de la rivière Ougra, puis se retirent sans combat. La Moscovie se libère du joug Tatar et ne paiera plus de tribut. Après la mort d’Ivan III, son successeur Vassili III continue d’étendre la Moscovie et de renforcer son pouvoir.
Ivan Le Terrible (1533 > 1581)
A la mort de Vassili III, son successeur Ivan n’a que 3 ans. La mère d’Ivan prend alors les rênes du pays, mais 5 ans plus tard elle meurt mystérieusement. Ivan est persuadé qu’elle a été assassinée par des boyars, ce qui le rend méfiant et cruel. Son but sera dès lors de s’emparer de tous les pouvoirs. En 1547, il se fait sacrer Tsar de toutes les Russies. Le mot Tsar provient du latin Caesar. Tout le peuple est désormais au service inconditionnel d’Ivan le Terrible. Il reprend les conquêtes et s’empare des Khanats musulmans de Kazan et d'Astrakhan. Au nord, après l’exploration de la mer Blanche par des marins anglais, le Tsar autorise des échanges commerciaux entre les deux pays. A l’Est, d’immenses terres sont offertes à la famille Stroganov pour l’exploitation de mines de sel et le commerce des fourrures. Au sud, malgré de nombreux raids meurtriers provenant du Khanat de Crimée, Ivan décide de ne pas contre-attaquer car la Crimée est vassal du puissant empire ottoman. Ivan se tourne plutôt vers la Livonie dans le but d’avoir un meilleur accès à la mer Baltique et au commerce européen. Après des débuts victorieux, la Pologne-Lituanie, la Suède et le Danemark-Norvège interviennent et s’emparent de territoires. Mis en difficulté et de plus en plus paranoïaque, Ivan le Terrible met en place un régime de terreur, arrêtant et exécutant tous ceux qu’il soupçonne d’être contre lui. Il tue le Métropolite, rase Novgorod, et sa folie le pousse même à tuer son propre fils héritier.
La fin des Riourikides (1581 > 1598)
Après un traité de paix avec la Pologne-Lituanie, devenue la république des Deux-Nations. Ivan le Terrible meurt. Il a échoué en Livonie, mais il a réussi à mettre en place un régime autocratique. Son autre fils Fédor obtient le titre de Tsar, mais il est simple d’esprit et n’est pas apte pour ce poste. Il est dès lors secondé par son beau-frère Boris Godounov qui s'empare indirectement du pouvoir. A l’Est, la famille Stroganov finance des expéditions menées par des cosaques, c'est-à-dire des explorateurs mercenaires et guerriers chargés de coloniser de nouveaux territoires plus loin vers l’Est. Sans grands obstacles naturels ni résistances, ceux-ci évoluent rapidement et fondent des avant-postes le long des fleuves et rivières. En 1591, le dernier fils d’Ivan le Terrible, Dimitri Ivanovitch meurt mystérieusement à l'âge de 8 ans. Beaucoup accusent Boris Godounov d’avoir organisé l’assassinat afin de s’emparer du titre de Tsar. Sept ans plus tard, Fédor Ier meurt sans descendants, la dynastie des Riourikides s’éteint après 7 siècles de règne.
Temps des troubles (1598 > 1613)
Boris Godounov est élu Tsar. Mais rapidement, il est mis en difficulté par une des pires famines de l’histoire du pays. Pour tenter d’augmenter la production alimentaire, il renforce le servage des paysans, en leur interdisant de quitter les terres de leurs seigneurs. Boris est de plus en plus isolé et impopulaire. C’est alors qu’un jeune moine appelé Grégori Otrepiev fuit son monastère et part à Kiev. Sur place, il se revendique être Dimitri Ivanovitch, le plus jeune fils d’Ivan le Terrible, censé être mort 12 ans plus tôt. L’imposteur est reçu par le roi de Pologne à qui il demande une aide pour s’emparer du trône de Russie. Mais ce dernier, déjà en guerre contre la Suède protestante, ne veut pas se mettre la Russie à dos. L’imposteur lui promet alors des terres russes et la conversion de la Russie au catholicisme. Il obtient alors de quoi former une petite armée principalement composée de cosaques. En Russie, il gagne rapidement le soutien du peuple. A Moscou, Boris Godounov meurt subitement, le faux-Dimitri entre alors dans la ville et devient Tsar. Mais rapidement, les Boyards l’accusent d’être trop tourné vers l’Occident. Il est alors assassiné et ses cendres sont tirées au canon en direction de la Pologne. Un nouveau Tsar monte sur le trône, mais des rébellions éclatent un peu partout contre lui, alors qu’une dizaine de nouveaux imposteurs en tous genres apparaissent. Un second Faux-Dimitri fait de la ville de Touchino, aux portes de Moscou, sa capitale. Incapable de le neutraliser, Moscou fait une alliance avec la Suède, ce qui provoque l’entrée en guerre de la Pologne. Cette dernière s’impose et le Prince polonais obtient le titre de Tsar, soutenu par les Boyars qui veulent retrouver un équilibre. La Suède du coup se retourne cette fois contre la Russie, alors que tout le pays se soulève contre le nouveau Tsar. En difficulté, les polonais brûlent entièrement Moscou, puis après un siège sont chassés de la ville. Les délégués des villes russes se rencontrent alors pour choisir le nouveau Tsar. Michel Romanov, issu d’une vieille famille Boyar monte sur le trône. Il est le premier d’une nouvelle très longue dynastie, mais il hérite d’un pays ruiné et dévasté. Tout est à reconstruire alors que les armées polonaises et suédoises sont toujours présentes.