Mansa Moussa

On commence au début du 13e siècle en Afrique de l’Ouest. Au sud du désert du Sahara, le petit royaume du Mali, avec sa puissante armée, domine la région et conquiert progressivement les royaumes voisins, jusqu’à atteindre le royaume Songhaï de Gao. Le désormais empire du Mali, est très riche, car ses sols regorgent d’or, ce qui en fait l’un des plus grands producteurs et exportateurs de ce métal précieux au monde. Or, chaque pépite d’or qui est extraite est la propriété de l’empereur, le roi des rois qui est appelé le Mansa.

Au nord, les touaregs gèrent depuis des siècles des routes commerciales qui traversent le Sahara et qui permettent au Mali d’exporter son or, mais aussi du sel et des esclaves qui sont issus de razzias plus au Sud. Ces routes commerciales mènent jusqu’au Caire, la capitale du sultanat mamelouk qui est alors l’une des plus importantes villes au monde, au coeur du monde musulman et reliée aux routes commerciales de la mer Méditerranée et à celles de l’Océan indien.

Aux alentours de 1310, le Mansa dont on n’est pas certain de l’identité aujourd’hui, rêve d’explorer l’Océan Atlantique pour découvrir ce qu’il se cache derrière l’horizon. Il part alors à la tête d’une importante expédition maritime. On ignore aujourd’hui ce qu’il est advenu de cette expédition, mais on sait qu’un certain Moussa est alors chargé de gérer l’empire pendant l’absence du Mansa. En 1312, sans retour, ni nouvelles de l’expédition, Moussa monte sur le trône de l’empire. Rapidement, il étend et renforce encore son pouvoir dans toute la bande de terre entre le Sahara au Nord et les forêts tropicales au Sud, contrôlant ainsi un empire d’environ 40 à 50 millions d’âmes. Par ailleurs, Mansa Moussa veut ouvrir son empire au monde et entame des relations diplomatiques avec les États au nord du Sahara, tout en développant les routes commerciales.

Étant de confession musulmane, en 1324 il décide de faire son pèlerinage jusqu’à la Mecque. Il part alors à la tête d’une immense caravane de 60 000 personnes, composée de soldats, d’officiels, de commerçants et d’une suite personnelle de 12 000 serviteurs ou esclaves, tous vêtus de tissus et de produits de luxe. De nombreux animaux sont emmenés pour l’alimentation, ainsi que 80 dromadaires qui transportent entre 10 et 13 tonnes d’or selon les sources. Une telle expédition marque bien sûr les esprits tout le long du parcours, et plus particulièrement au Caire où Mansa Moussa séjourne pendant trois mois et où il se montre très généreux, offrant de grandes quantités d’or à ceux qu’il rencontre. Après une entrevue avec le sultan mamelouk, il continue son pèlerinage jusqu’à la Mecque. Sur place, il convainc de nombreux savants et architectes de l’accompagner au Mali pour l’aider à développer et embellir son empire. Parmi eux se trouve un certain Abou Ishaq es-Sahéli, un poète et architecte originaire de Grenade et qui deviendra l'architecte officiel de Mansa Moussa.

Sur le chemin du retour, ayant épuisé ses réserves d’or, certains récits disent même que Mansa Moussa aurait été contraint d’en emprunter au Caire. Mais cet afflux aussi soudain d’autant d’or a un impact sur l’économie de la ville. Le cours de l’or chute, ce qui entraîne une hyper-inflation, et la monnaie locale mettra plus d’une décennie à s’en remettre. De son côté, Mansa Moussa arrive au Mali et découvre que son armée maté une importante révolte à Gao et a pris le contrôle de la ville. Il y passe alors et met directement au travail son nouvel architecte es-Sahéli à qui il demande de construire une mosquée en briques de terre cuite, ce qui est une première dans la région. Mansa Moussa décide ensuite de développer plus particulièrement Tombouctou qui est idéalement située, entre les routes commerciales du Sahara et le fleuve Niger qui traverse l’Empire. Une importante mosquée est construite, ainsi qu’un palais impérial et une université islamique. Enfin, une grande muraille est édifiée tout autour de la ville pour la protéger notamment des attaques du royaume Mossi voisin. Le commerce s’y développe rapidement, si bien que la ville apparaît désormais sur les cartes des républiques italiennes qui dominent le commerce dans la mer Méditerranée.

Mansa Moussa meurt probablement en 1337, vers l’âge de 57 ans, laissant derrière lui un riche et puissant empire qui perdurera encore un siècle et demi. Au moment de sa mort, l’économie au Caire n’est toujours pas stabilisée. Par contre la population est encore marquée par son passage et de fil en aiguille, le bouche à oreille est parvenu jusqu’en Europe où l’intérêt monte pour cet empire lointain où l’or semble couler à flot. En 1375, le roi d’Aragon offre au roi de France un atlas extrêmement détaillé du monde connu en Europe, sur lequel on voit Mansa Moussa assis sur un trône, portant un globe d’or. Au XV ème siècle, le Portugal profite du développement de la caravelle, un navire maniable capable d’affronter les Océans pour entamer des explorations maritimes le long des côtes de l’Afrique, notamment à la recherche de ce fameux empire du Mali, afin de prendre le contrôle des routes commerciales qui passent par le désert en les détournant vers l’Océan. Aujourd’hui, certains considèrent que Mansa Moussa est l’homme le plus riche de l’histoire. Il est cependant quasiment impossible d’évaluer précisément sa richesse et de la comparer avec celles d’autres époques. D’autant plus que la plupart des informations qui nous sont parvenues et qui nous ont permis d’écrire ce texte, proviennent essentiellement de récits transmis oralement de générations en générations, ou de textes d’historiens et de voyageurs arabes qui ont croisé Mansa Moussa lors de son pèlerinage où qui ont voyagé plus tard au Mali.